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« Vous êtes confrontés à une frustration inattendue : vous sentez votre envie de réagir agressivement ou même de vous écraser. La réaction qui vous envahit est forte, mais vous vous rendez bien compte que ce serait inapproprié, que ce n’est pas la solution que vous souhaitez. En même temps, vous ne voulez pas vous laisser tomber en ignorant cette situation qui vous affecte. Vous restez coincé avec un état de tension dans votre corps. »

Il nous arrive souvent d’être confronté au lâcher-prise. Nous avons tous des moments où il n’y a rien de mieux à faire que d’accepter la situation et d’arrêter de nous battre intérieurement. Nous ne parlons pas ici de démission ou de soumission. Nous parlons de lâcher-prise.

Le lâcher prise ne se produit qu’à certaines conditions. Malgré notre bonne volonté, nous ne parvenons pas toujours à lâcher prise face aux expériences qui nous affectent, soit positivement ou négativement. Supposons que nous sommes frustrés parce que l’évènement attendu ne se produit pas ou encore parce qu’un évènement non-désiré se produit; notre organisme a comme premier réflexe de combattre et de fuir le malaise ou de s’accrocher au bien-être. Nous essayons de garder le contrôle sur notre expérience intérieure et/ou sur l’extérieur. En termes psycho-corporels, cela peut se manifester de différentes façons :

  • nous nous dissocions de notre corps pour ne pas ressentir cette expérience;
  • nous nous contractons pour bloquer les sensations et les émotions soulevées;
  • nous déchargeons à travers une action impulsive pour nous débarrasser de cette charge indésirable;
  • nous essayons de maintenir le plaisir pour éviter de vivre la perte;
  • nous cherchons une stratégie pour changer la situation pour pouvoir relâcher.

Que veut dire le lâcher-prise dans ce contexte et comment y parvenir de façon saine ?

Parlons d’abord de ce qu’est le lâcherprise. C’est cette capacité de se laisser ressentir pleinement l’expérience soulevée sans chercher à la changer. En d’autres mots, c’est accepter de vivre ce qui est là, dans mon corps. L’acceptation de l’expérience ressentie nous rend libre ensuite de choisir l’action qui nous convient le mieux, celle qui répond le plus justement à nos besoins compte tenue de la réalité. Nous ne cherchons ni à fuir, ni à éviter, ni à contrôler. À ce moment, nous sommes libres d’agir comme nous le voulons. Nous pouvons renoncer, insister, partir, nous battre, nous retirer ou adopter n’importe quel autre comportement. L’énergie qui nous habite en est une de libre circulation et d’ouverture.

Cette attitude est très différente de la démission. Lorsqu’on démissionne, on laisse tomber ce à quoi on tenait pour une raison quelconque. Parfois, c’est tout à fait dans le sens du respect de soi. On peut avoir pris conscience qu’on ne tient plus à ce qu’on poursuivait – nous n’en n’avons plus envie, ce n’est plus approprié, nos besoins ont changé, etc.

Nous pouvons aussi démissionner lorsque, après avoir fourni de grands efforts, nous nous rendons compte que nous ne pouvons pas y arriver. Dans ce dernier cas, il se peut que nous lâchions prise. Par contre, il se peut que nous démissionnions parce que c’est notre façon de fuir la frustration ou d’éviter une déception, un affrontement ou même un effort qui nous pèse ou nous menace. Dans ces cas, notre démission n’est pas un choix de démission nous laisse affaissés, avec moins d’énergie ou contractés dans un état de tension retenue. Cette expérience énergétique est différente de la résultante énergétique du lâcher-prise.


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Regardons les étapes qui mènent au lâcher-prise.

1ère étape du lâcher-prise

La première étape est la réalisation que l’évènement nous affecte. C’est une étape importante de prise de conscience que nous sommes affectés – c’est-à-dire de présence à notre expérience à travers des indices corporels comme : une augmentation de la tension, une contraction, un changement de l’humeur, certains types de pensées, certaines impulsions de comportements, etc. Combien de fois nous laissons-nous emporter dans le tourbillon de la vie et des actions-réactions sans prendre le temps de réaliser ce qui nous arrive ? Sans cette conscience claire qui vient de l’écoute de soi, nous sommes simplement en réaction à partir de nos modes de survie et de recherche de l’équilibre connu. Ce connu n’est pas toujours le meilleur pour nous dans le présent même s’il peut être soulageant ou rassurant (comme piquer une colère parce que nous sommes frustrés ou tout faire pour changer une situation jusqu’à ce qu’elle ne nous dérange plus).

2e étape du lâcher-prise

La deuxième étape consiste à reconnaître la nature de l’expérience ressentie. C’est une étape dans laquelle nous acceptons de rester avec les sensations suffisamment longtemps pour identifier la nature de l’expérience. Cette identification nous permet d’être en contact avec les véritables enjeux qui se jouent et de faire la différence entre le présent et le passé. Cette étape est nécessaire pour arriver à un véritable lâcher-prise. On ne peut vraiment gérer que la vérité. Les fausses croyances peuvent nous amener à toute sortes d’expériences qui semblent parfois justes à différents niveaux, mais qui laissent une trace dans les signes corporels : légère tension résiduelle après nous être dit que nous laisserions tomber… jusqu’au moment où une nouvelle frustration bénigne nous fait exploser.

3e étape du lâcher-prise

La troisième étape consiste à faire la différence entre le présent et le passé. Lorsque des enjeux du passé se mêlent au présent, le lâcher-prise sera souvent plus difficile, car les évènements ressentis dans le passé ont pu l’être avec une teinte plus forte de menace à notre intégrité. Il nous est plus difficile d’accepter d’être critiqués lorsque nous avons l’impression que c’est une critique de notre être entier qui est faite. Nous avons alors l’impression que nous sommes littéralement détruits, sans valeurs et indignes d’être aimés. Ce sera plus facile à accepter si nous reconnaissons les enjeux du passé. Nous pouvons voir que nous ne sommes pas dans le présent, identifiés aux actions qu’on nous reproche. Nous sommes troublés de ces critiques, mais moins menacés dans notre existence même.

4e étape du lâcher-prise

La quatrième étape est d’accepter de ressentir dans notre corps les sensations reliées à cette expérience de critique (pour garder cet exemple) et d’accepter les émotions éveillées. Nous pouvons tolérer de les laisser entrer profondément en soi et de les ressentir pleinement à partir du moment où nous ne sentons pas notre intégrité menacée. Cette dernière condition est celle qui permet de véritablement lâcher-prise au lieu de fuir de quelque façon.

5e étape du lâcher-prise

La cinquième étape consiste à lâcher prise face à l’objet ou la situation qui éveille une réaction émotive en soi. Lorsque nous avons accepté de ressentir pleinement l’expérience éveillée, nous devenons libres de nos actions, libres de nos choix. Lorsque nous ne sommes plus à combattre nos sensations et nos émotions, nous pouvons aller vers l’objet désiré ou affronter la situation dérangeante avec une énergie toute autre. Nous pouvons tout aussi bien renoncer à l’objectif et, au besoin, choisir de ne pas agir ou choisir d’agir. Notre organisme ne nous dicte plus une réaction pour gérer de façon défensive l’expérience ressentie. Libérés des peurs d’atteinte à notre intégrité, nous devenons libres face aux formes et aux résultats. Nous pouvons lâcher-prise et choisir avec sérénité et confiance une action appropriée par rapport à nos besoins fondamentaux et nos valeurs profondes, humaines et spirituelles. Notre sentiment de soi est détaché des formes, des intensités et des résultats.

Le lâcher-prise est une expérience psychocorporelle qui ne peut être dictée par la volonté. Notre organisme en entier est impliqué dans ce processus. Sans le relâchement corporel, le lâcher-prise au niveau des comportements et des attitudes pourrait n’être qu’un leurre. Le critère ultime du lâcher-prise est la vitalité retrouvée, la qualité d’ouverture du cœur et de bien-être ressenti.

André Duchesne, M.Ps.
Psychothérapeute et formateur accrédité en PCI

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